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L’Évangile est une invitation joyeuse pour tous ceux qui souffrent et se sentent exclus de la vie. La piété populaire se déploie sur le Mont Royal, à l’Oratoire Saint-Joseph. On y accueille toute personne qui veut s’arrêter, se regarder, reprendre son souffle, prier et célébrer dans l’action de grâces ;
C’est là une pastorale authentique et indispensable, comme l’avait intuitionné le saint frère André.
Il est heureux qu’il existe des lieux où puisse se vivre en toute liberté la foi chrétienne. Ce sont en réalité des lieux extraordinaires de créativité et d’expression de la foi d’une grande partie du peuple de Dieu.

Plus de deux millions de pèlerins et de visiteurs visitent l’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal à chaque année. C’est le plus grand lieu de pèlerinage au Canada et le plus grand temple au monde dédié à Saint-Joseph. Seulement le quart des personnes qui s’y arrêtent y viennent pour assister à une célébration religieuse. Les autres y viennent pour des raisons touristiques, d’autres pour des activités pastorales ou culturelles ou encore pour des raisons personnelles.

UNE MISSION

Sans nul doute, c’est un lieu fort pour exprimer sa foi, son intériorité et ses dévotions. C’est pourquoi, dans son plus récent énoncé de mission, l’Oratoire Saint-Joseph tient compte de toute cette réalité :

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L’Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal, fondé par le frère André, est un sanctuaire catholique dédié à Saint Joseph. C’est un lieu d’expression de la foi, de célébration, de prière et de paix. L’Oratoire Saint-Joseph accueille dans le respect de leur culture et de leur cheminement pèlerins et visiteurs venus s’y ressourcer. Les hommes et les femmes qui œuvrent au sanctuaire se rendent attentifs à leurs souffrances et à leurs joies dans un esprit d’ouverture et de compassion.

UNE FOI EXPRIMÉE LIBREMENT

Ainsi donc, plusieurs des personnes qui fréquentent le sanctuaire de façon régulière se plaisent à y venir à cause de la liberté d’expression de leur foi qu’ils peuvent y manifester en dehors des célébrations cultuelles bien organisées et sans doute, de la possibilité d’y garder un certain anonymat, ce qui serait difficilement possible en paroisse ou en d’autres lieux de culte. Elles ne désirent pas d’encadrement particulier ou traditionnel ou ne désirent pas s’y faire reconnaître. On y rencontre des gens de toute foi, de tout âge et de tout horizon. Beaucoup de ces personnes peuvent être assimilées à la périphérie à laquelle réfère si souvent le pape François. Parmi elles, se retrouvent bon nombre de sans-voix et de laissez pour compte de toutes sortes. On y voit également des personnes handicapées physiquement ou intellectuellement. On peut même s’y voir soi-même, par exemple, dans les moments les plus difficiles ou les plus souffrants de la vie.

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Bref, il y a là des distants, des gens en recherche, des mal-aimés, des rejetés ou des porteurs de grandes souffrances. Beaucoup de ces personnes ont peine à croire qu’elles ont véritablement leur place à l’intérieur de l’église ou de la société. C’est là la plus grande partie du peuple de Dieu que les religieux et agents de pastorale de l’Oratoire ont à accueillir. C’est à cette réalité qu’ils ont quotidiennement à faire face, et c’est pourquoi ils ont dû au cours des années passées développer des approches pastorales adaptées aux divers profils observés.

ACCUEILLIR ET ÉCOUTER

Ainsi donc, selon le contexte et la situation des personnes qui viennent à nous, une approche pastorale plus communautaire et traditionnelle ou davantage axée sur les désirs et la réalité individuels sera privilégiée. Une approche plus traditionnelle signifie davantage axée sur le rite et les célébrations communautaires et les pratiques sacramentaires. Une approche plus axée sur les besoins individuels signifie utiliser une pastorale du parvis où il s’agit de rencontrer l’autre quand il le veut et tel qu’il est dans son expérience de vie, son cheminement et ses choix.

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Dans tous les cas, il s’agit pour nous d’accueillir, d’écouter et de partager comme le faisait frère André. L’héritage spirituel que nous a légué le frère André n’est pas simplement constitué par un monument de pierres mais avant tout par une pratique pastorale axée sur l’accueil respectueux de la différence, l’ouverture à l’autre dans sa réalité et la compassion. 


Ce faisant, nous croyons nous montrer attentifs à plusieurs des éléments mentionnés par le pape François dans sa récente exhortation apostolique Evangelii Gaudium. En un mot, nous nous efforçons de redonner de l’espérance et de la vie là où semblaient vouloir triompher les forces du mal et de la destruction.

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La joie de témoigner de l’Évangile dans le monde d’aujourd’hui et le désir d’alléger pauvretés et souffrances de ceux qui viennent à nous sous-tendent en quelque sorte toute la vie spirituelle, pastorale et liturgique du sanctuaire et révèlent le choix de nos options préférentielles.

TOUT CE QUI VIT MÉRITE LE RESPECT

Si l’on veut bien comprendre le phénomène de la dévotion populaire et de son expression, il faut tout d’abord l’accueillir pour ce qu’elle est : la foi spontanée du peuple de Dieu qui se vit au quotidien et qui est liée aux petits et aux grands événements de sa vie (Cf. No 8 du Directoire sur la piété populaire et la liturgie). Faut-il alors s’étonner de voir des personnes monter les marches de l’Oratoire à genoux afin que le club de hockey canadien obtienne une victoire lors des finales de la coupe Stanley ? Faut-il empêcher des gens de toutes provenances, traditions et âges d’écrire quelques mots d’appréciation ou d’appel à l’aide sur la statue de saint frère André qui se trouve dans la crypte-église de l’Oratoire ? Ou encore faut-il s’indigner de ce que pendant les célébrations liturgiques plusieurs personnes choisissent de mettre la main ou d’embrasser les pieds de Jésus suspendu au grand crucifix de la crypte plutôt que de porter leur pleine attention à la lecture de la parole de Dieu ?

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La foi populaire va au-delà de la convention sociale ou ecclésiale. Elle peut sans doute parfois être teintée de superstitions, s’avérer déroutante ou même aberrante mais elle tient son origine du désir de vie qui habite toute personne et de la confiance qui réside en son cœur en une réalité qui dépasse son monde et son quotidien. Elle est source de vie, d’amour et d’espérance et manifeste une vérité en soi. C’est pourquoi, elle mérite le respect et l’attention de toute l’Église.

DES LIEUX POUR SE RETROUVER

Il est heureux qu’il existe des lieux où puisse se vivre en toute liberté la foi chrétienne. Ce sont en réalité des lieux extraordinaires de créativité et d’expression de la foi d’une grande partie du peuple de Dieu. Qu’on se rappelle, comment saint Pierre lui-même a appris du centurion Corneille, que le baptême n’est pas réservé à une élite ou une caste à l’intérieur de l’Église. Qu’on se rappelle également que la prière du publicain fut préférée par Jésus à celle du pharisien, ainsi que son attitude devant les petits enfants et les rejetés de la vie, accueillis les premiers dans le royaume des Cieux. Alors, ceux qui se croient ou se disent au cœur de la vie de l’Église doivent se faire un devoir de rejoindre et de se montrer solidaires des exclus ou de ceux qui gravitent à sa périphérie. En ce sens, s’il est une chose que les sanctuaires et ceux qui les fréquentent peuvent apporter à l’ensemble de l’Église, c’est de lui apprendre à mieux se faire missionnaire et à mieux remplir sa mission d’amour envers tous les enfants de Dieu.

vol. 119, no 4 • 15 juillet 2014

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