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QUÊTE SPIRITUELLE

DÉSIRER DIEU

JACQUES GAUTHIER

Jacques Gauthier nous invite ici à la prière. Dieu a fait de nous des êtres de désir.
C’est ce désir, cette recherche qui nous mettent en route vers Lui. Pour monsieur Gauthier,
l’expression de ce désir est une forme de prière. « Notre désir d’être comblé au creux de nos pauvretés attire sa miséricorde », souligne-t-il. Il donne l’exemple de Saint-François qui exprimait son désir de Dieu dans ses actes de miséricorde. Parlant de désir, Jacques Gauthier emprunte les mots de Saint-Augustin qui a si bien illustré ce désir au cœur de la vie chrétienne.

Nous sommes des êtres de désir et de parole qui aspirent au bonheur. Créés à l’image d’un Dieu trinitaire, nous voulons des relations qui comblent. Ce désir profond de bonheur, n’est-ce pas Dieu qui l’a mis dans notre cœur pour que nous allions à sa rencontre ? Il nous attire à lui par son Fils, la création, l’amour, la beauté, l’autre, la prière, le désir. Les mystiques chrétiens parlent de ce désir avec ardeur. Saint Bernard écrivait dans son Traité de l’Amour de Dieu : « Dieu a fait de toi un être de désir et ton désir , c’est lui, Dieu ». Il s’inspirait d’Augustin qui affirmait que « le désir est le fond du cœur ». En désirant Dieu, on se rend capable d’être comblé par lui. 

« Dieu a fait de toi un être de désir et ton désir, c’est lui, Dieu. »
 
SAINT-BERNARD
LE DÉSIR DEVIENT PRIÈRE

Dieu est une présence significative à l’âme qui attend qu’on le reconnaisse. La prière, expression par excellence du désir, est le moyen le plus simple et le plus direct pour entrer en relation personnelle avec Dieu. C’est l’échange de deux regards, de deux désirs. Lorsque nous désirons Dieu, nous le cherchons ; et lorsque nous le cherchons, nous le désirons. Notre désir devient notre prière. Il suffit de fermer les yeux quelques minutes, de descendre dans notre cœur, d’écouter le silence, de faire un acte de foi en remettant à Dieu notre désir. « Seigneur, tout mon désir est devant toi » (Ps 37 (38), 10).

 

Le désir nous met en route à la recherche du Dieu de joie, révélé en Jésus Christ. « Console-toi, tu ne me chercherais pas, si tu ne m’avais trouvé », faisait dire Pascal à Jésus. Nous sommes ce que nous cherchons et désirons. Cette recherche et ce désir sont souvent expérimentés comme un manque, un vide. On parvient à posséder tout en ne cherchant à posséder rien. Dieu nous accompagne sur le chemin, mais nous ne le voyons pas. Notre désir d’être comblé au creux de nos pauvretés attire sa miséricorde.

 

C’est ce qu’a vécu François d’Assise à son retour de Spolète à l’été 1205. Son désir de Dieu se manifestait par ses aumônes aux pauvres, ses méditations dans une grotte du mont Subasio, ses rencontres avec les lépreux. Il rencontrait Dieu en faisant preuve de miséricorde. Le Christ lui fit signe à la petite église en ruine de Saint-Damien. En prière, face au crucifix, il entend : « François, va et répare ma maison qui, tu le vois, tombe en ruine. » Cet appel sera son désir et sa mission : relever l’Église. Il bâtira son identité en structurant son être sur Jésus crucifié reconnu comme le Christ ressuscité.

François d'Assise rencontrait Dieu en faisant preuve de miséricorde.

Il y a un autre espace où s’exprime cette illumination. Mon père est très attaché au rituel catholique pratiqué à l’église de sa paroisse. Parfois, quand je suis chez lui, à la campagne, nous allons assister à la messe ensemble, le dimanche matin. Cela a toujours été pour moi un grand privilège de paraître, accompagné de mon père,  dans l’église où j’ai été baptisé. C’est comme si nous ne faisions plus qu’un. Après la récitation du Notre Père, quand le prêtre nous invite à nous donner la paix, nous nous prenons dans les bras l’un et l’autre. Cet espace, très intime, marque pour moi une autre manifestation de ce que j’appelais plus haut l’espérance.

UNE ŒUVRE D’AMOUR

Le désir est œuvre d’amour dans le christianisme, illustré par le corps offert du Crucifié, sur lequel brillent les lueurs de Pâques : « La nuit ne saurait retenir/Ce corps où monte le désir/de recommencer un autre âge » (Didier Rimaud).

 

Nous allons à Dieu avec notre désir. Saint Augustin parle de la vie chrétienne comme un saint désir : « Sans doute, ce que tu désires, tu ne le vois pas encore ; mais le désir te rend capable, quand viendra ce que tu dois voir, d’être comblé… De même Dieu, en faisant attendre, étend le désir ; en faisant désirer, Il étend l’âme ; en étendant l’âme, Il la rend capable de recevoir… Désirons donc, mes frères, parce que nous devons être comblés »[1].

 

Dieu, plus haut que le plus haut et plus intime que le plus intime, est au-dedans de nous, alors que nous le cherchons souvent au-dehors. « Tu nous as fait pour toi et notre cœur est sans repos jusqu’à tant qu’il repose en toi » (Confessions 1, 1). Qui le cherche le trouve, et qui le trouve le loue, écrit Augustin. Ce désir de chercher et de louer Dieu est un dynamisme intérieur, une libre attraction qui unifie notre être.

 

[1] Augustin, Commentaire de la Première Épître de saint Jean, IV, 6, Sources chrétiennes 75, Cerf, p. 232.

Pour aller plus loin, voir : 

Guide pratique de la prière chrétienne (Presses de la Renaissance)

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Jacques Gauthier  www.jacquesgauthier.com

vol. 122, no 2 • Juin 2017

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