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QUE DIRE À MES PETITS ENFANTS ?

Un grand parent peut partager un peu de son expérience face à la vie, un peu de ce qu'il a vécu et ressenti. Saisir l'occasion quand elle se présente, autour d'une table, au moment d'une fête. Ici se raconte une expérience vécue au moment du dimanche de Pâques de l'année en cours.

À l'approche d'un dimanche ou d'une fête religieuse, je me demande chaque fois ce que comprennent mes petits enfants, et même mes deux enfants, de ce que nous célébrons. Ils sont quatre, garçon et fille dans chaque famille, d'âge qui s'étale de 5 à 15 ans.

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Ils vivent dans une ère trépidante, bombardés et fascinés par l'image magique des dessins animés et vidéos toujours nouveaux que fournissent à satiété la télévision, l'internet.

Ce sont nos expériences et nos quêtes souffrantes qui nous ouvrent. Il faut avoir faim et soif pour découvrir la valeur incomparable de l'eau et du pain.

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Je me suis donc mis à la rédaction d'une forme de poème qui dirait ces lieux intérieurs, ordinaires où Dieu vient nous rencontrer sous la forme d'interrogation propre à ouvrir l'esprit.

 

J'ai senti le besoin d'écrire au moment où, dans les jours qui approchaient, nous allions nous retrouver ensemble autour de la table pour célébrer   la fête de Pâques.  Que veut dire Pâques pour ces jeunes esprits alors que tout est promesse dans leur vie qui débute ? Est-ce que ce pourrait être autre chose et plus que des oeufs en chocolat, des lapins ou des poules à croquer ? je me suis arrêté aux situations que chacun vit ou a vécu: une séparation, la dispute avec son frère, l'inquiétude de perdre son emploi, le suicide d'un ami, la maladie, etc. puis j'ai composé un poème.

 

Au début du repas alors que chacun a pris place à la table festive dressée par Michelle,  je les invite à un moment de silence, puis je leur demande,  brièvement,  ce que veut dire Pâques pour eux, les grands et les petits. Ils écoutent et sont pensifs dans l'attente de qui va parler.  Au bout d'un moment,  je leur fais lecture lente  du poème que j'ai composé, disant en mots simples et proches de notre vécu quotidien ce que Pâques signifie :

Pâques veut dire « passage »

passage de la vie, vers la vie qui dure,

c’est de cette manière que Dieu nous visite.

 

Passage des ténèbres à la lumière,

de la nuit au jour,

Passage de l’hiver au printemps,

du gel au dégel,

des arbres qui perdent leurs feuilles

et des plantes qui sèchent et meurent

à la renaissance des bourgeons, des feuilles, des fleurs,

de la vie éteinte à la vie qui éclate.

 

Passage de la peine à la joie,

de l’inconnu et l’incertitude

 vers un projet qui prend forme,

passage de la haine à l’amour,

de l’agressivité à la réconciliation,

de l’offense au pardon,

de l’attaque à la paix,

du rejet à l’accueil,

de l’esclavage et la dépendance

à la libération.

 

Passage de la naissance à l’enfance,

à l’adolescence, au choix de sa vie,

à l’âge adulte, à la maturité comme un fruit,

à l’accomplissement et au don de soi.

 

À Pâques, nous célébrons le mystère de la Vie qui  triomphe.

Jésus, rejeté par ses ennemis,

est arrêté, ridiculisé, torturé,

il descend dans la  mort,

et est mis au tombeau

pour être relevé dans la vie

par la puissance de l’Esprit.

 

La Vie nous entraîne, l’Esprit nous appelle,

Nous vivons nos passages

pour que le meilleur sorte de nous et éclate.

Le mystère de Jésus ne peut être compris si l'on en reste dans la position des sages et des savants.

J'ai été impressionné par l'écoute attentive d'un chacun, spécialement celle des grands, mes enfants. La discussion ne s'est pas enclenchée comme je le pensais. Peut-être la faim avait-elle priorité !  Quelques mots partagés après cette écoute m'ont fait saisir  que la réflexion avait quand même touché profondément le cœur. Et l'expression recueillie des visages le laissait voir.

 

Le mystère de Jésus ne peut être compris si l'on en reste dans la position des sages et des savants. Ce n'est pas là connaissance accessible aux initiés d'abord. Cette voie nous laisse dans les concepts et les idées sans jamais nous amener à la rencontre personnelle avec Celui qui est Bonne Nouvelle. Car Il nous accueille tel que nous sommes, avec le poids parfois insupportable de notre quotidien.

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Ce sont nos expériences de vie, nos projets et nos initiatives réussis ou échoués, nos déceptions et nos tromperies, nos fourberies, nos indignations et nos révoltes les plus légitimes, nos tentatives à nous relever, nos faiblesses sans fin, tous ces vécus qui tissent nos journées, c'est là que vient nous rejoindre la Bonne Nouvelle du Royaume présent  quand nous nous ouvrons.

 

L'accueil inconditionnel, sans jugement, de ce que chacun vit dans son cheminement de vie et sa recherche de sens, son tâtonnement propre à la croissance, c'est là que germe lentement une parole d'espérance et de confiance accueillie dans la joie.

 

Un grand parent n'a pas à faire la leçon à moins qu'on l'interroge. Il n'est pas là pour parler de haut. Son écoute attentive et son sourire accueillant font plus que les mots trop pleins de suffisance.  

vol. 122, no 4 • Décembre 2017

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