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LA VIE À DEUX... ET PLUS

L'ESPRIT DE FRATERNITÉ DANS LA VIE DE COUPLE

La vie de couple peut être vécue dans un esprit de fraternité, marqué par le dialogue. Quel défi ! Les conversions quotidiennes que la relation exige font du couple un lieu pascal.
L’amour l’un de l’autre s’avère un choix sans cesse renouvelé. S’aimer et aimer Dieu, c’est tout un, inséparable. Il faut que l’amour l’emporte.
Celui ou celle qui cherche le couple idéal est souvent celui qui n’a pas assumé sa propre vérité.

Peut-on parler de fraternité au sein d’un couple ? Oui, car il y a un « Je » et un « Tu ». Jésus lui-même, en tant que vrai Homme, s’est fait le frère de chaque homme et de chaque femme avant de se révéler comme vrai Dieu. Ainsi, avant de voir l’époux ou l’épouse qui me fait face, je dois voir le frère, la sœur. Dans mon couple il faut que « l’amour l’emporte en moi ! », que j’apprenne à aimer grâce à des conversions permanentes¸ à des prises de conscience qui vont m’aider à modifier mon attitude et à devenir responsable. 

UNE FRATERNITÉ UNIVERSELLE

Saint François nous invite à une fraternité universelle enracinée dans la personne de Jésus : « Tout homme est mon frère. Et il y a lieu de le servir pour le porter à l’amour de Dieu en toute joie et allégresse. » Il nous signifie par là que, comprendre, c’est bien, mais comprendre avec joie, c’est mieux ; agir, c’est bien, mais agir avec joie, c’est mieux ; prier, c’est bien, mais prier avec joie, c’est mieux ! C’est la joie qui va parfaire tout ce que nous faisons dans la journée. Elle ancre l’esprit de fraternité. François nous montre que l’esprit de fraternité est une étape dans l’amour, l’étape de la gratuité.


Il y a un terme clé de la spiritualité franciscaine: servir. Le service mutuel, vécu dans l’égalité, la simplicité et l’humilité est le fondement de l’esprit fraternel. Toutefois, au sein d’un couple, l’un des partenaires peut être appelé à assumer une responsabilité et donc à faire preuve d’autorité, mais son autorité ne saurait être un pouvoir de domination. L’autorité est un service elle s’exerce dans la rencontre et le dialogue. Dieu lui-même se laisse rencontrer, c’est un Dieu de dialogue et son autorité est une autorité d’amour. Nous pouvons dès lors entrer dans la reconnaissance réciproque de nos vulnérabilités et nous exercer à l’entraide fraternelle. 

LE COUPLE, UN LIEU PASCAL

La relation fraternelle  nous confronte à la gestion des difficultés. Une vie de couple peut être vécue comme un lieu « pascal ». En effet, il y a au sein d’un couple, de grandes joies mais aussi de grandes souffrances. La difficulté de vivre en relation fraternelle nous montre la nécessité de faire un travail de reconnaissance de soi afin de mieux apprivoiser les passions qui nous gouvernent : l’amour propre, la susceptibilité, la haine, la colère, la jalousie, l’égo etc. pour ensuite aider et mieux aimer notre prochain, le frère ou la sœur en humanité avec lequel nous avons choisi de vivre. Seul l’homme qui fait la vérité sur lui-même devient capable d’être frère. Il peut accueillir les autres avec leurs limites et leurs faiblesses.

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A l’instar de toute créature, tout couple est « inaccompli » mais en devenir « d’accomplissement ». Celui ou celle qui cherche le couple idéal est souvent celui qui n’a pas assumé sa propre vérité. Il va rêver son couple, son foyer, au lieu de le construire jour après jour. Or, il y a des forces chaotiques internes et externes qui surgissent pour faire échouer cette aventure qu’est le couple. En fait, cette aventure est le pari de la foi. La foi procure la force de se déposséder soi-même et de se sentir responsable de son prochain. Le couple doit mûrir pour arriver à sa plénitude, c’est-à-dire à son accomplissement d’amour. Chacun doit mûrir pour arriver à sa plénitude. Chacun doit avoir le souci d’aimer de l’amour du Christ.

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Vivre la relation fraternelle implique la vigilance, c’est-à-dire le sens de la responsabilité personnelle : Ne pas s’abriter derrière la loi, le devoir ou l’obligation, ou encore derrière l’image du couple parfait ou idéal. Se remettre en question sous le regard du Christ. Rencontrer vraiment l’autre sans craindre son jugement ou son regard. Ecouter sans se projeter. Se savoir imparfait, divisé, plein de contradictions et accepter sans les juger, que les autres ne soient pas parfaits. L’esprit fraternel, l’amour, est donc une question de vérité et de justice selon le cœur et non seulement selon la loi.  

CHOISIR D’AIMER

Vivre la relation fraternelle implique de choisir d’aimer. Croire et aimer exigent une attitude concrète de vérité. « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Mc 12,31). Jésus prend soin de préciser « comme toi-même ». Par là, il nous montre les conditions et les difficultés de cet amour. Il nous fait sentir combien l’acceptation de nous-mêmes tels que nous sommes est essentielle pour pouvoir aimer l’autre tel qu’il est. Au sujet d’un époux et d’une épouse qui s’unissent, voici ce que disent les Pères : L’amour est ouverture à l’autre et libre don de soi. Chacune des personnes qui s’unissent se donne à l’autre et le reçoit en échange. C’est seulement dans cette communion que chacun s’enrichit et peut s’épanouir dans toute l’expression de son être. L’acte d’amour implique alors un amour de l’autre en Dieu et un amour de Dieu en l’autre. C’est-à-dire, d’aimer dans la pensée de l’Amour en sachant que l’autre est Image de Dieu. 

L’AMOUR EST INSÉPARABLE

Ainsi, Dieu, « moi » et le prochain son inséparables. L’amour filial et l’amour fraternel sont indissociables. Je ne peux pas dire que j’aime Dieu si je n’aime pas mon prochain. Je ne peux pas me dire Fils adoptif du Père si je ne reconnais pas en l’autre, mon frère, ma sœur en Christ. Je ne peux pas me dire époux, épouse, si je n’aime pas d’abord de l’amour fraternel du Christ.

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L’esprit fraternel a donc besoin d’être ajusté et réajusté en permanence. Cela passe par l’ouverture à l’autre, dans l’écoute de la Parole, par l’apprentissage du regard, par l’attention, la fidélité, la réconciliation, le pardon. Par la nécessité de « sortir de soi » pour voir avec les yeux du cœur afin de soutenir notre compagnon ou notre compagne, dans la mesure de notre propre faiblesse autant qu’on voudrait être soutenu soi-même, non point avec le secret espoir d’un juste retour le moment venu, mais dans la gratuité complète et évangélique du don de soi.

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Oui, l’esprit fraternel ne peut s’accomplir sans Jésus ! Il faut que l’amour l’emporte… en moi !

vol. 119, no 3 • 15 mai 2014

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