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Comment accueillir l’immigrant ? Un franciscain réfléchit sur l’expérience vécue par la fraternité dans son milieu. « Dans notre expérience, la rencontre devient lieu de découverte. Qui est cette personne, enfant de Dieu, qu’il m’est donné de côtoyer ? Comment me parle-t-elle de Dieu ? Que peut-elle m’apprendre sur elle, sur le monde, sur sa relation à Dieu ? »
Le Québec d’aujourd’hui accueille bon an mal an environ 50 000 nouveaux arrivants venus de partout qui contribueront à son développement social et économique.

Il y a huit ans, une nouvelle fraternité franciscaine voyait le jour au 7785 de l’avenue d’Outremont, dans le quartier Parc-Extension de Montréal. Aujourd’hui, nous y sommes six frères franciscains enthousiastes, résolus à témoigner de notre foi au Christ et à tisser des liens, dans ce quartier unique et coloré. Notre groupe est multiculturel, car nous sommes originaires du Vietnam, de la Corée, de l’Île-du-Prince-Édouard, de l’Ontario et du Québec.

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Parc-Extension est non seulement considéré comme l’arrondissement le plus diversifié de Montréal, mais c’est aussi le plus pauvre. Il est composé à plus de 60% de personnes issues de l’immigration récente. Les principaux lieux d’origine des nouveaux arrivants de notre quartier sont l’Inde, la Grèce, le Pakistan, le Sri Lanka, Bangladesh et Haïti.

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À l’immigration indo-asiatique, s’ajoutent depuis une quinzaine d’années des immigrants et des commerces africains d’origines diverses, dont le Ghana, le Cameroun, la Cote d’Ivoire, la République démocratique du Congo, l’Algérie ou le Maroc. En tout, une centaine de groupes ethniques s’y partagent un territoire d’environ 2 kilomètres carrés.

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Évidemment, le quartier est aussi multi-religieux. En plus des communautés de souche catholique, anglicane ou protestante, on y trouve des orthodoxes, des hindous, des musulmans, des sikhs, des bouddhistes, ainsi que des personnes agnostiques ou athées.

COMMENT ACCUEILLIR?

Dès le départ, notre fraternité franciscaine a voulu vivre en lien de solidarité avec la réalité de ce quartier, où en général règne un climat de respect, mais où on peut aussi vivre une méconnaissance de l’autre.

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Face à une telle diversité, se présentait le défi d’apprendre à vivre avec des voisins d’origines très diverses. Nous voulions trouver un moyen de favoriser les rapprochements et de promouvoir l’harmonie dans la différence. Aussi, au fil du temps, nous en sommes venus à la conclusion que la meilleure façon de tisser des liens signifiants avec nos voisins, c’est d’aller vers eux avec confiance, tout simplement. Pour ce faire, il ne doit y avoir aucune ambiguïté quant à notre propre identité, quelle qu’elle soit. Une saine estime de soi est un préalable essentiel à l’accueil de l’autre !

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Au cours des années passées dans le quartier, nous avons été à-même de constater que les comportements d’exclusion, d’intolérance et d’indifférence sont souvent liés à la peur. Nous avons aussi observé que bien que notre société soit engagée à plein dans la promotion des droits individuels et collectifs, elle favorise peu les expériences concrètes de rencontre des différences culturelles et religieuses.

L’HÉRITAGE FRANCISCAIN

De son temps, François d’Assise a brisé tous les tabous et surpris ses proches en se rendant en terre musulmane pour dialoguer avec le chef civil et religieux des Sarrazins. Il s’y rendait non pas pour piller, tuer et anéantir - comme on le faisait souvent avec ses ennemis religieux à cette époque - mais plutôt dans l’esprit d’une rencontre.

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Inspirés par l’expérience de François, nous abordons notre présence dans le quartier de Parc-Extension comme une occasion d’aller à la rencontre de l’autre et de s’émerveiller de sa singularité. Ainsi, dans notre expérience, la rencontre devient lieu de découverte. Qui est cette personne, enfant de Dieu, qu’il m’est donné de côtoyer? Comment me parle-t-elle de Dieu ? Que peut-elle m’apprendre sur elle, sur le monde, sur sa relation à Dieu ?

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Notre modeste présence dans ce quartier de Montréal ne changera pas le monde, mais elle nous transforme. Les particularités des personnes avec qui nous prions, vivons et travaillons nous aident à nous percevoir différemment. En accueillant l’autre dans sa différence, je touche à ma propre singularité, et j’apprends à aimer Dieu, qui nous a créés uniques et différents !

vol. 119, no 5 • 15 octobre 2014

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